INTERVIEW. Pierre Caillet : « la qualification ? Tout est encore possible ! »

05/01/2022

Après une première partie consacrée au bilan sportif du début de saison, suite et fin de l’interview avec Pierre Caillet. Cette fois, l’entraîneur en chef de l’ASBH revient sur le changement de staff estival, évoque la phase retour, le recrutement pour la saison à venir mais aussi son lien avec Béziers.

Ces derniers mois le staff a été fortement renouvelé : trouves-tu les critiques de supporters justifiées en ce qui concerne la qualité du jeu, le manque d’expérience de l’encadrement technique ? Aimerais-tu étoffer ce staff ?

Le staff a effectivement été renouvelé cette saison, découlant de la volonté habituelle d’un club de faire face du mieux possible à la fin d’un cycle de fonctionnement. Être performant pour un staff, c’est d’abord de la stabilité et du temps, mais c’est aussi savoir développer ses compétences et apporter aux joueurs de la nouveauté. Le recrutement de nouvelles personnes est à l’étude que ce soit sur le plan technique, réglementaire, médical ou l’analyse de la performance. Nous prendrons nos décisions en tenant compte de nos moyens financiers mais aussi en rapport aux besoins de notre équipe et de nos joueurs.

Les analyses de supporters dirigées sur le jeu, les joueurs, le fonctionnement du club ou les compétences du staff, sont pour moi naturelles. Certaines analyses sont objectives, d’autres manquent complètement de discernement sur le rugby et son fonctionnement. Je respecte totalement les avis de chacun, je sais très bien qu’il est très dur de faire l’unanimité tant les vérités humaines et sportives sont diverses et variées dans notre sport. Courir derrière la satisfaction de plaire à tout le monde est une perte de temps. Je préfère garder ce temps pour chercher à évoluer, faire progresser mon équipe tout en gardant mes convictions.

Je suis de toute façon assez professionnel pour personnellement me remettre en question principalement sur mon rôle, le jeu pratiqué, ensuite sur le travail de mon staff et enfin sur l’état d’esprit et les performances de mes joueurs sans attendre les directives émises par chacun. En tout cas, ce qui est sûr, c’est que nous voulons tous que notre club, notre équipe, retrouve de l’ambition. Cela mérite unité, patience, persévérance et un investissement de chaque instant quelque soient les moments traversés. Voilà déjà un trait de caractère qui devrait nous permettre d’avancer solidement ensemble.

L’attente est grande dans ce club. Il faudrait effectuer une phase retour à 45 points pour espérer être dans les 6. En 2017/18 l’équipe avait également 2 victoires à l’extérieur et 2 défaites à domicile avant de faire une phase retour de champion ! Faut-il s’en inspirer ? Est ce que la qualification reste jouable pour toi ?

Oui, chaque année les attentes sont grandes. Mais comment ne pas comprendre la volonté de tout un peuple pour un club historique comme le notre. C’est une pression qu’il faut savoir maîtriser, pour un supporter, un joueur, un dirigeant mais aussi un entraîneur. Clairement nous ne serrons pas dans les six premiers du championnat parce que nous sommes Béziers.

Le rugby change, les facteurs de réussite sont aussi très différents aujourd’hui. Nous serons dans les 6 premiers du classement parce que notre club se structurera avec patience, stabilité en lien avec le rugby de haut niveau tout simplement. Ce qui m’intéresse, ce n’est pas de se qualifier une fois de temps en temps mais de le faire régulièrement. Pas la peine pour moi non plus de comparer une saison à une autre. La compétition en quatre ans a beaucoup trop évolué pour en tenir compte.

Si nous prenons la situation actuellement, tout est encore possible ! Nous travaillons chaque jour pour mener à bien cette fin de saison. Stratégiquement, le mois de janvier et février sont très importants. Nous verrons également les ressources que nous aurons à disposition durant cette période, mais une chose est sûre : nous donnerons le maximum ! C’est clairement durant cette période que nous nous gagnerons un printemps ambitieux.

Après une saison Covid qui aura été marquée par des tribunes vides, on suppose que la présence des supporters biterrois est une source de motivation supplémentaire ?

C’est un grand plaisir de retrouver du monde dans les tribunes lors de nos matchs. C’est aussi tres plaisant de se sentir à nouveau soutenu par nos supporters. Passer devant la tribune de face à la fin de l’échauffement, sortir du vestiaires en voyant les tifos, entendre les « Aqui, aqui es Besiers ! » ou d’autres chants dans les moments clefs du match sont toujours source de motivation et de fierté quand tu portes ce maillot rouge et bleu.

La présence des supporters biterrois est un atout supplémentaire pour notre équipe. Vous êtes capables de nous transcender ou, clairement à l’inverse, de faire perdre pied à l’équipe adverse et au corps arbitral sur certaines décisions. Ce qui est sûr, c’est que nous avons besoin de vous dans la réussite comme dans les moments difficiles que nous traversons. Sem Força !

On voit que le recrutement a déjà démarré dans certains clubs (prolongations et nouveaux joueurs). Est-ce le cas ici aussi ?

Effectivement, le recrutement a déjà commencé à Béziers comme dans tout les autres clubs! Nous avons à cet effet une commission sportive qui travaille au renforcement de nos besoins chaque année, que ce soit pour l’équipe professionnelle, le Centre de formation ou notre équipe Espoir. Notre stratégie est d’abord de prolonger rapidement nos joueurs cadres, les joueurs donnant satisfaction ainsi que nos jeunes joueurs à fort potentiel. Cela est plutôt en bonne voie et des annonces arriveront sûrement dès le début d’année pour confirmer cette information.

Nous recherchons également comme tout le monde des profils susceptibles de renforcer notre effectif la saison prochaine. Nous avons ciblés des besoins en première et troisième ligne ainsi que sur la charnière et le centre du terrain.

Nous devons forcément faire différemment que certains clubs ! C’est facile de recruter quand tu as de gros moyens et tu peux le faire rapidement. De notre côté, nous devons faire plus de recherches, cibler différents joueurs, différents niveaux de compétition ce qui nécessite plus d’analyses, d’adaptation et d’intelligence. Et bien sûr, il faut tenir compte de la concurrence des autres clubs et des moyens financiers dont nous disposons.

À Béziers, tu es passé de joueur (79 matchs disputés) à entraîneur des Espoirs, puis entraîneur des avants de l’équipe professionnelle et à ce jour entraîneur principal. Que représente ce club pour toi ?

Ce club représente énormément de chose à mes yeux. Je me retrouve dans son caractère et ses valeurs, j’aime son histoire, j’aime ce que le rugby représente ici quand tu es supporter, joueur, éducateur ou entraîneur. J’aime ce club parce que je vois et j’estime au quotidien le travail de chaque personne contribuant à ce que le club continue d’exister. J’aime ce club pour cette mentalité de n’être jamais satisfait des choses et de vouloir toujours faire différemment. J’aime ce club dans sa globalité pour ses qualités mais aussi ses défauts.

Je suis redevable, reconnaissant, fier et privilégié d’avoir porté ce maillot, d’être devenu éducateur de son école de rugby, entraîneur de son équipe Espoir et de son Centre de formation jusqu’au rôle que j’occupe aujourd’hui. J’ai commencé au plus bas et je me suis construis grâce à la confiance, la considération du club et des hommes (ils se reconnaîtront) qui font ou qui ont fait le club années après années. L’important sera toujours pour moi le club, ce qu’il représente et ce qu’il doit continuer de représenter.

Propos recueillis par Cédric Ferrères
Photos Thibaut Clariond